MERCI MADAME
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EXTRAITS - Les rites de remerciement
La réalisatrice s'avoue frappée par l'intelligence collective qui est en train de naître dans cette crise. "Les Français, poursuit-elle, ont établi des rites de remerciement massifs qui sont suivis. Ce sont de très beaux gestes politiques. Et ça prolonge les grèves contre la réforme et l'action des 'gilets jaunes' qui crient haut et fort ce qui est important dans nos vies. Parce qu'on vit dans un pays où ceux qui assurent les fonctions essentielles, qui font tenir debout la société sont sous-payés, méprisés."
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Coline Serreau salue à son tour les aides-soignants, les infirmières et infirmiers, les médecins qui travaillent dans les hôpitaux publics mais aussi les personnels des écoles, les profs, les chercheurs, etc.
La réalisatrice en profite pour tacler les joueurs de foot, "de jeunes crétins arrogants qui sont payés 10 millions d'euros par mois pour mettre un ballon dans un filet" et les GAFA : "il faut qu'ils payent leurs impôts, qu'ils rendent au peuple ce qui lui est dû."
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Des voix qui chantent pour juguler la solitude
Malgré ce sombre tableau et ce confinement, ennemi par définition de la communication, Coline Serreau trouve de quoi s'émerveiller. "C'est magnifique, s'enflamme-t-elle, les Italiens chantent aux balcons. Il y a des policiers qui offrent des sérénades à des villageois pour les réconforter. A Paris, des rues entières organisent des concerts du soir, des lectures, des poèmes, des manifestations de gratitude. Et c'est ça la vraie culture, la belle et la grande culture dont le monde a besoin. Juste des voix qui chantent pour juguler la solitude."
SourcesFrance interdaté du 24 Mars 2020
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Suite, en 2010 j’écrivais :
RépondreSupprimerCoronavirus: "Le courage est rare mais il est incroyablement répandu chez les personnels soignants"
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Alexandre Devecchio: En ces jours éprouvants pour tous, quels grands esprits conseillez-vous de lire? Quels penseurs lisez-vous vous-même actuellement?
Michel Onfray: Pour penser la question du coronavirus, le mieux est d’avoir recours à Nietzsche, notamment à sa méthode généalogique. Le philosophe allemand aide en effet à penser la question des causalités dans une époque qui aime tant activer les catégories de la pensée magique. Les versions complotistes font rage, les lectures religieuses également: une invention du capital pour faire des bénéfices, une création des Américains pour supprimer la suprématie chinoise, voire un projet chinois, mais également, version du frère de Tariq Ramadan, une punition divine à cause du dérèglement des mœurs de notre époque, le délire ne manque pas. La philosophie aide à activer les causalités rationnelles construites par les philosophes atomistes, matérialistes et épicuriens de l’Antiquité. Quant aux auteurs à lire, c’est sans conteste vers la philosophie antique romaine, qui était une école de sagesse pratique existentielle, qu’il faut se tourner. Je songe à Plutarque et Lucrèce, Musonius Rufus et Sénèque, Marc Aurèle et Cicéron. Autrement dit: aux épicuriens et aux stoïciens.
AD: Cet événement est révélateur de la nature humaine: incivisme, égoïsme, pillage parfois, mais aussi solidarité, abnégation… La philosophie nous aide-t-elle à comprendre ces réactions?
MO: Sous l’influence des penseurs de la déconstruction, eux-mêmes issus des déterminismes marxistes puis freudiens, contre toute bonne logique, voire tout bon sens, la tendance lourde est actuellement à la négation de la nature humaine! Or, elle existe. Qu’on lise ou relise tout simplement La Fontaine, ou bien les moralistes français du Grand Siècle, le XVIIe, que sont La Rochefoucauld ou La Bruyère. Tout s’y trouve dit. L’épidémie ne nous apprend rien que le fabuliste français ne nous ait déjà enseigné - un fabuliste qui, ça n’est pas un hasard, avait pris ses leçons notamment chez le grec Ésope et le romain Phèdre, voyez, on y revient! Dans le cadre de ma Brève Encyclopédie du monde, je travaille à un gros livre pour réhabiliter la nature humaine, Anima, livre qui ne manquera pas d’inviter à lire Darwin, qui nous rappelle, ou nous apprend, c’est selon, que nous sommes… un singe! À ne jamais oublier si l’on veut éviter d’errer philosophiquement!
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